Faire "sauter" les normes qui bloquent les innovations : voilà ce que proposent Bordeaux Euratlantique, Marseille Euroméditerranée et Grand Paris Aménagement dans le cadre d’un AMI "Permis d’innover" soutenu par l’Etat et dévoilé lors du Simi le 6 décembre. Objectif ? Prouver qu’il est possible de "passer d’une culture de moyens à une culture de résultat" et "libérer l’acte qui permet de fabriquer une ville de plus en plus contemporaine".
Bordeaux Euratlantique, Marseille Euroméditerranée et Grand Paris Aménagement ont lancé, mercredi 6 décembre à l’occasion du Simi, leur appel à manifestations d’intérêt "Permis d’innover". Soutenue par l’Etat et rendue possible par l’article 88 de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la démarche, à laquelle pourront se joindre d’autres établissements publics d’aménagement (EPA) intéressés, vise à identifier puis accompagner des innovations de toutes sortes, impossibles à mettre en place dans le cadre normatif actuel, et qui seront intégrées dans des projets immobiliers. "Nous sommes tous empreints d’une culture des moyens, notre droit est comme ça. L’opportunité qu’on nous offre aujourd’hui, c’est l’ouverture d’une porte, [qui permet de] passer de [cette] culture de moyens à une culture de résultat", explique Thierry Lajoie, DG de Grand Paris Aménagement.
L’AMI s’adresse à tous les "innovateurs" - architectes, start-uppers, bureaux d’études, entreprises de construction… -, qui sont "porteurs d’une innovation d’usage, technique, réglementaire, etc. qui se heurte aujourd’hui aux normes existantes et qui apporte un plus - environnemental, performanciel, pour aller plus vite ou coûter moins - sans dégrader ces autres volets", et qui n’ont "aujourd’hui pas de réponse dans les dérogations existantes", détaille Stéphan de Faÿ, DG de Bordeaux Euratlantique. "Trouvez les innovations, si vous êtes bloqués par une norme, on la fera sauter !", résume pour sa part Hugues Parant, DG d’Euroméditerranée, rappelant que dans les opérations d’intérêt national, les permis de construire sont accordés au nom de l’Etat, qui en assume la responsabilité en cas de problème lié au non-respect de la norme. "L’idée est que les EPA, dans le cadre des OIN, expérimentent des choses qui seront ensuite généralisables, dès qu’elles seront sans risque."
Mobilisation des services de l’Etat
Les "innovateurs" peuvent envisager tout type de solutions : "ce qui est dans le champ, c’est l’ensemble des normes qui sont dans les codes, et non pas ce qui relève du PLU", précise Thierry Lajoie. Et le DG de citer quelques exemples : réusages des eaux grises, adaptabilité des logements, permis de construire évolutif… Mais l’AMI a également pour objectif de faire remonter du terrain les blocages qui n’ont pour l’heure pas été identifiés.
Les services de l’Etat, qui accompagnent la démarche, seront mobilisés. "On va démontrer qu’on peut atteindre les mêmes objectifs avec des moyens différents, et avoir la preuve qu’on peut changer la règle", explique François Bertrand, sous-directeur de l’aménagement durable à la DGALN. Cela signifie que "l’Etat est simplificateur, innovateur, entrepreneur", se félicite Thierry Lajoie. Quant à l’aménageur, il "change de rôle" grâce à ce "permis de déroger" : "le temps de la prescription est finie, il est un facilitateur, un accompagnateur".
Les premiers PC espérés début 2019
Concrètement, les trois EPA veulent aller vite. Les candidatures*, qui se veulent simples (dix pages seulement), devront être remises en février prochain, et les dossiers retenus pour la phase 2 seront dévoilés lors du Mipim au printemps. Le mariage candidat/promoteur se fera en septembre, déclenchant la phase de préparation du permis de construire et de la dérogation. "Notre objectif est de déposer les PC dès début 2019", affirme Stéphan de Faÿ, rappelant que l’article 88 ne prévoit qu’une expérimentation, d’une durée de sept ans.
Combien de dossiers seront sélectionnés ? "C’est la grande inconnue", admet le DG de Bordeaux Euratlantique, qui évoque toutefois "deux à trois par EPA, s’il y a matière". "On est attendus au tournant, on le sait. Si on veut que cette petite révolution qu’on essaie de mettre en œuvre ne se referme pas tout de suite, on a intérêt à aller au bout". "Il faut prouver qu’on ne fait pas n’importe quoi, qu’on n’a pas ouvert une boîte de Pandore", insiste-t-il.
* Le règlement de l’AMI est disponible sur demande à ami-article-88@bordeaux-euratlantique.fr