Le projet urbain est un "réceptacle à frustrations", caractérisé par la "complexification" des évolutions – sociales, politiques, réglementaires, etc. – qui l’entourent, décrit Michel Hössler, de l’agence TER, Grand Prix de l’urbanisme 2018. Il défend ainsi la gestion climatique et les agricultures comme fils conducteurs du projet urbain. Et comme solutions aussi pour résoudre ses "contradictions", tant sociales, qu’écologiques, économiques, spatiales…
Dans ces conditions, peut-on encore faire du grand projet urbain ? La question a permis de lancer le débat sur la résilience organisé le 11 décembre à l’occasion de la remise du Grand Prix, au Palais Brongniart, à Paris.
Rares sont les grandes villes à mener encore de gros projets urbains. Nantes en fait partie. Pour la maire (PS) et présidente de la métropole nantaise, Johanna Rolland, "la première fonction d’un projet urbain ET paysager" est de répondre au "plus grand défi de notre société : la fragmentation". La fragmentation entre "le rural et l’urbain", entre "les quartiers populaires et le centre", ou encore "le paradoxe écologique"… A Nantes, le participatif et l’expertise des usages est un préalable quasiment systématique à toute opération urbaine, une façon "de faire encore plus de politique", selon l’élue. Ce qui permet aussi "de ne pas céder au premier lobby". A condition également "d’être clair" et de maintenir le cap, d’après elle.
Le rapport au temps est l’un des autres paradoxes du grand projet urbain. Entre la réponse politique qui s’inscrit dans le temps long, et l’urgence sociale ou environnementale par exemple. L’agence TER, qui œuvre à Nantes, "a eu la capacité de travailler à différentes échelles de temps" et c’est ce qui a plu à Johanna Rolland.
"Nous devons encore mener des grands projets urbains et paysagers", pour éviter de tomber, alerte-t-elle, dans la "standardisation des villes", et résorber les fractures territoriales. D’où l’intérêt de partir du terrain, des usages, de la géographie du territoire. Et puis, revendique la maire, il faut "réinventer les relations entre la ville centre et les agglomérations voisines", en trouvant une forme de "réciprocité".
► Après plus de quatre heures de débats, Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, a officiellement remis le trophée à l’agence TER : "les urbanistes sont à l’articulation de thématiques trop souvent sectorisées (…) la pensée urbaine, par essence optimiste" est "indispensable à l’amélioration et à l’appropriation du cadre de vie".
Les lauréats ont profité de la présence de la ministre pour formuler un vœu : que le statut de fonctionnaire territorial soit accordé aux paysagistes.