"Plusieurs voies" pourraient être explorées pour renforcer l'efficience de la politique du logement, selon la Cour des comptes

La Cour des comptes publie, chaque année, un rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques. Le bilan de l’audit de 2016 pointe du doigt un déficit budgétaire plus important que prévu et préconise, entre autres, des économies sur le logement pour tenter de réduire cet écart.

Sur la politique du logement social, tout d’abord, qui "a privilégié des objectifs ambitieux en termes de construction neuve, alors que d’autres leviers existaient pour gérer plus activement le parc de logements sociaux existant et corriger les déséquilibres marqués constatés entre l’offre et la demande".

Réduire la construction de logements sociaux

Dans son rapport sur la politique de logement social publié en février dernier, la Cour a souligné que l’accroissement du parc de logement social était "coûteux pour les finances publiques (7,8 Md€)" et qu’il s’inscrivait dans un "objectif quantitatif national de construction de 150 000 logements par an, là où 60 000 suffiraient pour atteindre l’objectif légal".

Les sages recommandent donc de "réorienter les politiques publiques vers une gestion plus active du parc existant". Une proposition qui "sonne comme une mauvaise blague", pour la CNL, "renforçant ainsi la pénurie et donc les difficultés d’accès à un logement social, aussi bien pour les classes modestes que les classes moyennes".

Une plus grande sélectivité de l’accès aux logements sociaux et l’organisation d’une meilleure continuité entre parcs sociaux et privés permettraient "d’éviter que l’attribution d’un logement social revienne de facto à 'remettre les clés à vie’ au bénéficiaire", explique la Cour, qui propose de "s’adresser prioritairement aux publics modestes et défavorisés en diminuant les plafonds de ressources en zone tendue".

Les avantages fiscaux des HLM dans le viseur…

Une autre des mesures suggérées concerne la suppression d’une partie des avantages fiscaux dont bénéficient aujourd’hui les HLM, "en bonne santé financière et qui ont un résultat excédentaire annuel d’environ 3 Md€", selon la Cour, qui a examiné les trois principales dépenses fiscales associées à la politique de logement social : l’application d’un taux réduit de TVA, de 5,5 % ou 10 % selon le cas, aux opérations contribuant à la production de logements sociaux (près de 2 Md€) ; l’exonération de l’impôt sur les sociétés pour les organismes HLM (environ 1 Md€) ; enfin, les mesures d’exonération en faveur du logement social de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB, plus de 0,6 Md€), presque totalement supportées par les collectivités territoriales.

Des constats qui "font ressortir que le ciblage de ces aides est peu efficient au regard des objectifs de la politique du logement". Cela pousserait "davantage le logement social vers une fragilité financière déjà engagée avec la diminution des aides à la pierre depuis 2010", craint pour sa part la CNL.

… comme ceux des bailleurs privés

Pour ce qui concerne les aides au logement, "une réflexion devrait être engagée afin de prendre en compte le taux d’effort réel des locataires selon qu’ils bénéficient d’un logement HLM ou qu’ils occupent un logement privé", indique la Cour. L’audit suggère notamment la suppression du cumul pour les étudiants entre les APL et la déduction fiscale dont bénéficie le foyer auquel est rattaché l’étudiant en question.

Enfin, la Cour souhaite réexaminer les aides fiscales aux logements privés (taux réduits de TVA, avantages fiscaux en faveur de l’immobilier locatif) dont "l’efficacité est incertaine et qui s’accompagnent d’importants effets d’aubaine". Cette dépense fiscale avait déjà été critiquée par la Cour dans son rapport de 2012 sur la situation des finances publiques. Elle avait recommandé que ces avantages soient remis en cause si de nouvelles études n’en démontraient pas l’efficience. A terme, une voie plus radicale serait "de viser l’extinction de l’ensemble des dispositifs d’incitation à l’investissement locatif privé". Au total, la dépense publique élevée en faveur du logement "n’atteint pas ses grands objectifs", indique la Cour, où d’importants gains d’efficience sont possibles.

"Stigmatiser le logement social" n’est pas la solution pour la CNL, qui met en garde contre le paradoxe induit par ces recommandations : "adopter des mesures ayant pour conséquence de diminuer l’offre HLM ne permettra jamais de répondre à la crise du logement inhérente à la forte demande".

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